
La plateforme SVOD d’Amazon a pris la décision de contester devant le Conseil d’État l’accord de 2025 sur la chronologie des médias. Alors que s’ouvre le Festival de Cannes, elle s’explique sur le sens de sa démarche.
Dans son communiqué du 12 mai, Prime Video remet en cause l’accord sur la chronologie des médias signé en février dernier, estimant « qu’au regard des pratiques et usages actuels, la vidéo à la demande par abonnement ne saurait rester la “fenêtre sur cour” de l’exploitation cinématographique ».
Depuis sa création sous forme de librairie en ligne en 1994, le géant américain du e-commerce n’a cessé de remonter les étapes de la chaîne de création, jusqu’à aboutir à son service Prime Video tel qu’on le connaît aujourd’hui. Dès les années 2010, il investissait le domaine de la distribution cinématographique avec Amazon Studios et le rachat de MGM, en 2022, est présenté comme « le dernier chapitre de cette quête passionnée pour trouver les meilleures histoires et les acheminer jusqu’à leur public ».
Une intégration revendiquée dans l’écosystème français
Avec plus de 120 créations originales produites en Europe au cours des cinq dernières années, Prime Video revendique sa place dans le paysage audiovisuel européen. « Par ailleurs, nous avons à ce jour soutenu le développement et la production de 30 œuvres cinématographiques françaises indépendantes d’une grande diversité, aussi bien en termes de genre que de budget, dont 11 premiers films », précise la plateforme. Et comme preuve de son intégration « harmonieuse » dans le modèle culturel français, Amazon Prime rappelle qu’il a été « le premier service audiovisuel international à signer [toujours en 2022, ndlr.], un accord bilatéral avec l’industrie audiovisuelle française portant sur la diversité de nos investissements dans la création française ».
Lors du CinemaCon le mois dernier, Amazon MGM Studios a dévoilé un line-up 14 films pour 2026, et promet une cadence d’une quinzaine de productions cinématographiques internationales par an, suivant une ligne éditoriale « variée et audacieuse, [et] mettant tout particulièrement en valeur l’expérience en salles », comme l’indique l’expansion internationale annoncée de son activité de distribution cinéma. Parmi ses succès dans les salles françaises, Amazon MGM Studios cite Creed III (2,3 millions d’entrées en 2023), Challengers de Luca Guadagnino (483 000 entrées en 2024) et, plus récemment, Ma Mère, Dieu et Sylvie Vartan de Ken Scott (1,45 million d’entrées à date depuis la sortie du film le 19 mars dernier), coproduit avec Gaumont.
Une intégration revendiquée dans l’écosystème français
Mais, « pour pouvoir continuer à produire des films, les succès doivent primer sur les déceptions », prévient la firme, soucieuse de mettre en place les conditions d’« une exploitation optimale des œuvres dans les salles et au-delà, et incitant à la prise de risques ». Or, selon le géant américain, la chronologie française des médias, dans sa forme actuelle, « pénalise délibérément l’exploitation des films sur petit écran, limite leur exposition auprès du public français et bride ainsi leur vie après la salle ». Face à ces règles jugées « pénalisantes », Amazon MGM Studios a renoncé à sortir Mr Wolff 2, avec Ben Affleck, dans les salles françaises, en raison du délai de 17 mois dès lors imposé avant sa diffusion sur Prime Video – par ailleurs jugé trop propice au piratage.
La nécessité de « moderniser les règles du secteur » est, ainsi, avant tout présentée comme celle d’« embrasser l’évolution des pratiques culturelles des Français. Ces derniers veulent pouvoir découvrir et voir des films en salle comme à la maison ». Ainsi, tout en déclarant rester déterminés à poursuivre leur intégration dans le paysage culturel et créatif français, Prime Video décrie « des règles anciennes [qui] finissent par avoir un effet contraire à leur objectif initial. Notre action devant le Conseil d’État est avant tout un appel à la reprise de discussions constructives avec tous nos partenaires de l’industrie cinématographique française – dans l’intérêt des films, et en phase avec les attentes du public ».
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