Dans une tribune intitulée “Lutte des places”, les indépendants du GNCR et de l’Acid alertent sur les exigences de programmation pour les films art et essai porteurs. Ils citent Warner en particulier, dont nous avons sollicité la réaction.
Le sujet n’est pas nouveau, et plus encore ces dernières années post-Covid. Cette fois, c’est un cas particulier que les exploitants du GNCR (Groupement national des cinémas de Recherche) et les cinéastes de l’Acid (Association pour le cinéma indépendant et sa diffusion) mettent en avant. Ils alertent en effet « sur la teneur des négociations et les pratiques mises en place par le distributeur Warner Bros. France dans la programmation du film Leurs enfants après eux de Ludovic et Zoran Boukherma et plus généralement des exigences de programmation croissantes sur certains titres porteurs de l’art et essai. »
Pour les auteurs de la tribune, le cas n’est pas isolé et « en cette période de fin d’année où les propositions à forts potentiels d’entrées abondent, les distributeurs de ces films demandent aux cinémas un taux d’occupation des écrans par un même film si important qu’il devient très difficile, voire impossible, d’offrir une place à la pluralité des œuvres proposées par ailleurs ». Ils citent ainsi, au sujet de l’adaptation du roman de Nicolas Mathieu, des exigences de programmation « intenables » pour qui veut proposer d’autres titres, et qui « tendent également à exclure les cinémas d’un et de deux écrans, incapables de se soumettre à de telles conditions ».
De son côté Olivier Snanoudj, senior vice-président de la distribution chez Warner Bros. France & Benelux, nous répond que « personne n’a contesté nos demandes, qui n’ont pas l’air d’avoir choqué les exploitants, à part une seule salle municipale de périphérie. Ce sont des pratiques régulières pour un film de l’ampleur de Leurs enfants après eux. Nous assumons la façon dont nous le sortons, toujours dans le respect des règles et des usages de la profession, comme nous en avons l’habitude chez Warner ».
Sur le principe de cette tribune, le représentant de Warner conteste « le fond et la forme, car elle s’apparente à des accusations publiques, alors que nous n’avons pas été consultés au préalable. Elle prend aussi à parti les auteurs qui n’y sont pour rien ».
Les auteurs de la tribune rappellent en effet que « le travail de Ludovic et Zoran Boukherma a pu bénéficier à ses débuts de l’appui de l’Acid, des salles du GNCR et plus largement des salles art et essai qui leur ont permis d’atteindre le succès mérité qu’ils connaissent aujourd’hui. Si nous nous réjouissons de constater la reconnaissance de ces talents que leur parcours atteste, nous alertons sur la difficulté d’en voir advenir de nouveaux avec de telles pratiques. Si Warner Bros. France ou d’autres distributeurs veulent continuer à bénéficier des prises de risques et du travail des dénicheur·euse·s de talents partout sur le territoire, il est primordial que les nouvelles·aux cinéastes puissent jouir d’une exposition similaire à celle dont a bénéficié un film tel que Willy 1er. [premier long des frères Boukherma] ».
Pour Olivier Snanoudj, Leurs enfants après eux « est un film au budget important, que nous défendons car nous l’aimons beaucoup, et nous voulons lui donner l’opportunité de trouver le plus large public possible. Nous demandons juste aux salles que le film sorte correctement ».
Et quand les auteurs de la tribune rappellent la recommandation du Médiateur du cinéma sur les conditions d’exposition des films dans les cinémas de deux et trois écrans, en demandant que soit « mise en œuvre une pensée vraiment collective de la diffusion des films en salle », le senior vice-président de la distribution chez Warner semble partant : « Il est nécessaire qu’il y ait une vraie discussion constructive, entre exploitants et distributeurs, avec des gens responsables et apaisés ».
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