Dans la tradition des films de monstres du studio Tōhō, Godzilla Minus One n’a pas bénéficié d’une longue carrière en France ; une sortie limitée à deux jours, puis une ressortie classique sur deux semaines. Avec plus de 170 000 entrées, le long métrage a rencontré un vif succès, auquel Piece of Magic Entertainment ne s’était pas préparé. Caspar Nadaud, fondateur de la société de distribution, revient sur la chronologie de cette réussite.
La bête était là, en France. Elle n’est pas restée longtemps, et ce, malgré des conditions favorables pour y faire son nid et prospérer pendant plusieurs semaines, mais elle était bel et bien là. À l’origine de son réveil, le studio japonais Tōhō, qui pour les 70 ans de sa célèbre franchise Kaijū – le genre cinématographique mettant en scène des monstres géants – sort Godzilla Minus One, le 3 novembre 2023, dans l’archipel nippon. Un mois plus tard, le monstre traverse le Pacifique pour s’établir sur les écrans étasuniens, où il deviendra l’un des films étrangers les plus rentables de l’histoire du box-office américain, avec plus de 55 millions de dollars de recettes.
Quelques jours après, la France découvre le long métrage de Takashi Yamazaki, mais à l’instar des attaques de Godzilla, sa sortie est subite et éphémère : 200 séances en formats premium les jeudi 7 et vendredi 8 décembre. « Lorsque l’on sort un film, on fait des recherches sur son potentiel dans chaque pays et nos conclusions nous permettent d’établir la stratégie de distribution. Pour Godzilla, nous savions que la France était un territoire important, mais nous estimions qu’une sortie événementielle était suffisante », confie Caspar Nadaud, fondateur et directeur général de Piece of Magic Entertainment (POM), la société néerlandaise aux commandes de la distribution de Godzilla Minus One dans 42 territoires, dont la France. « La décision de cette sortie avec visa exceptionnel était prise avant même la sortie aux États-Unis, mais on a très vite compris la force et l’ampleur du film… »
« A perfect storm »
Les films du studio Tōhō n’ont communément pas leurs quartiers dans les salles tricolores, à l’image de Godzilla Resurgence en 2016 – aussi connu sous le titre de Shin Godzilla –, qui n’avait pas joui d’une distribution sur le sol français. Le volet de Takashi Yamazaki aurait pu s’en tenir à sa sortie événementielle, mais « les retours étaient énormes », en témoignent les 17 000 entrées sur deux jours et les notes presse/spectateurs sur AlloCiné, respectivement de 3,9 et 4,2. Les formats premium, à savoir Imax, 4DX et Dolby Atmos, ont été désignés pour ces 200 séances : « Nous voulions offrir une expérience exceptionnelle, tout comme Tōhō, qui désirait un focus sur ces salles », pose Caspard Nadaud. De fait, la plupart des salles équipées étant sous le giron de Pathé, Godzilla Minus One est essentiellement projeté dans les cinémas du circuit, mais également ceux de Kinepolis.
Puis, comme dans un « perfect storm », le monstre disparaît de nos écrans, aussi vite qu’il était apparu : « Contrairement aux autres pays, la France questionne souvent la stratégie de distribution et face au succès du film, j’ai tout de suite contacté nos partenaires à Tōhō pour leur dire qu’il fallait donner une réponse aux fans, narre le distributeur, qui décide alors d’opter pour un visa classique. Les ayants droit avaient vraiment envie d’une sortie nationale, donc nous avons ciblé plus de cinémas, sans nous cantonner aux formats premium. »
Le prolongement d’un succès
Face à ce succès « inattendu » de Godzilla Minus One, tant en France qu’à l’international, Piece of Magic rempile donc, le 17 janvier, avec une sortie classique… mais uniquement sur deux semaines. « La raison de cette courte exploitation est simple : nous respectons la stratégie globale de Tōhō. Ce n’est pas mon choix et j’aurais adoré poursuivre cette diffusion, surtout que l’on a fait 170 000 entrées en deux semaines. Si nous avions pu continuer, nous aurions rapidement dépassé les 300 000 », déclare, non sans une pointe de déception dans le phrasé, Caspar Arnaud. Au 31 janvier, Godzilla Minus One cessait d’être exploité dans tous les pays, à l’exception des États-Unis, qui ont pu profiter du gros lézard un jour de plus.
Malgré un temps d’exposition réduit, le film a bénéficié d’un solide bouche-à-oreille, sur lequel POM a capitalisé par la voie d’un marketing clairvoyant : « La décision de cette sortie sur deux semaines a été prise avant Noël, donc nous n’avons pas eu le temps de tout mettre en place. Il n’y avait pas d’affichage public par exemple, mais nous avons fait un focus sur les réseaux sociaux ainsi que la publicité dans la presse et les publications sociales. » Une promotion organiquement fortifiée par une critique élogieuse, mais également un public japonophile, « qui connaît bien la franchise Godzilla de Tōhō », et dont les échos favorables à la sortie initiale ont rapidement pris de l’ampleur.
Naturellement, les 100 millions de dollars de recettes au box-office mondial interrogent quant à une suite de Godzilla Minus One ; pas encore d’actualité en dépit de la volonté du réalisateur. Une chance de revoir le monstre sur nos écrans d’ici là ? Contrairement au Japon et aux États-Unis, la version en noir et blanc intitulée Godzilla Minus One/Minus Color – en hommage au premier film de 1954 – n’a pas été diffusée en France et sa sortie n’est ni dans les plans de Tōhō, ni de Piece of Magic. Néanmoins, la bête devrait débarquer en VOD dans minimum 4 mois, conformément à la chronologie des médias.
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